Toutes les données collectées par la sonde New Horizons ne sont pas encore arrivées sur Terre. Le peu qui est disponible réserve déjà de belles surprises.
Au lendemain du passage historique d’une sonde d’origine humaine au plus près de Pluton, tout le monde était impatient d’avoir quelques détails sur les découvertes qui ont été faites. Alors qu’il faudra de nombreux mois pour que New Horizons envoie tout ce qu’elle a collecté, les premières données réservent déjà quelques surprises de taille.
Pour nous dévoiler les premières données récoltées par sa sonde New Horizon, la NASA a suivi une progression dramatique, de Hydra à Pluton, en passant par Charon.
Hydra
La NASA a ouvert sa présentation en présentant la petite Hydra, l’une des quatre petites lunes qui gravitent autour du couple Pluton-Charon (avec Styx, Nyx et Kerberos). Découverte en 2005, elle n’est pour le moment connue que sous la forme d’un point flou photographié par le télescope spatial Hubble.
Bien que très pixélisée, l’image prise par New Horizons permet de donner une dimension, de 43 km par 33 km à Hydra. Le cliché dévoilé permet aussi d’avoir une idée plus précise de sa forme irrégulière.
« L’analyse de sa réflectivité, située entre celle de Pluton et de Charon, suggère qu’elle est composée de glace d’eau », a commenté Hal Weaver, de l’université Johns-Hopkins.
Une question se pose déjà : pourquoi un aussi petit corps n’a pas fini noir comme du charbon, tout comme la comète Tchouri par exemple.
Charon
« Elle ne nous a pas déçus », a déclaré Cathy Olkin, du Southwest Research Institute, Boulder, en parlant de Charon, cette lune sans atmosphère de 600 km de rayon.
« On s’attendait à découvrir des terrains anciens, constellés de cratères. C’est un tout autre paysage qui se dessine : une série de falaises qui s’étirent sur 1 000 km, suggérant une fracture de la croûte, résultat probable d’événements internes. Des canyons géants, profonds de 8 km, qui ridiculisent ceux de l’Ouest américain, non pas creusés comme eux par l’érosion, mais par des processus géologiques qu’il va falloir comprendre. Enfin des zones lisses, presque exemptes de cratères, l’accumulation de ceux-ci au fil du temps donnant généralement une idée de l’ancienneté de la surface. Leur quasi-absence peut être interprétée comme le signe d’un ressurfaçage récent », explique la scientifique.
« Il faut imaginer qu’il y a une activité géologique, alors qu’on considérait généralement Charon comme un astre mort. C’est pour moi le plus intrigant », a commenté Emmanuel Lellouch, astronome à l’Observatoire de Paris.
L’équipe de New Horizons a baptisé « Mordor » la zone la plus sombre, au pôle Nord de Charon, en référence à la région des forces des ténèbres du Seigneur des anneaux. « On y devine quelques points clairs, causés peut-être par des impacts, ce qui pourrait indiquer la présence d’un voile fin couvrant la glace », précise Cathy Olkin.
Elle avance l’hypothèse assez audacieuse que : « ce voile sombre pourrait être le résultat de l’irradiation par le rayonnement solaire d’une partie de l’atmosphère d’azote et de méthane qui fuit de Pluton, et serait capturé par son compagnon ».
Pluton
« Nous voyions ce cœur briller comme un fanal », témoigne Alan Stern, le responsable scientifique de la mission, en parlant de l’une des premières structures observées lors de l’approche de New Horizons, lors des derniers mois d’approche a été baptisée « le cœur », en raison de sa forme bilobée. Ce cœur a été informellement baptisé « Tombaugh Regio » en hommage à Clyde Tombaugh, l’Américain qui a découvert Pluton en 1930.
L’image en haute résolution permet de zoomer sur le sud de cette zone et de découvrir là encore peu de cratères d’impact, mais des montagnes de glace hautes de 3 500 m ! « Les géophysiciens vont devoir retourner à leur table de travail pour nous dire comment cela se fait », commente Alan Stern.
Ces découvertes posent plusieurs questions. Alors que des débris auraient dû marquer sa surface avec des cratères, leur absence semble indiquer un lifting récent, ce qui signifie que Pluton serait un astre actif.
Les glaces d’azote et de méthane ne sont pas assez solides pour pouvoir s’empiler au point de faire de telles montagnes. Dès lors, comment se sont-elles formées ? « Nous l’ignorons », avoue John Spencer, du Southwest Research Institute.
« Cela montre en tout cas qu’une planète naine isolée peut conserver une activité après 4,5 milliards d’années », a souligné Alan Stern.
Il est certain que les images qui suivront fourniront d’autres informations et indices.
La Nasa en a fait un gif animé :