Grâce aux images prises par la sonde américaine New Horizons, les scientifiques découvrent des détails insoupçonnés de Pluton. C’est comme cela qu’ils ont découvert des plaines, des sommets, des canyons, des chaines de montagnes, un relief nettement plus varié que supposé au départ. L’ensemble de ces données permet d’avoir une meilleure connaissance de la planète naine, mais aussi de faire des découvertes surprenantes.
La dernière découverte en date est l’œuvre d’Alan Stern, du Southwest Research Institute Boulder (Colorado, États-Unis). En tant que principal chercheur pour la mission New Horizons et auteur principal d’un article qui vient d’être publié, il démontre l’existence d’un lac gelé à la surface de Pluton.
C’est grâce à une image prise par le Long Range Reconnaissance Imager (LORRI) qu’un ancien lac d’azote liquide a été repéré dans une chaîne montagneuse de Pluton, au nord de la zone baptisée Spoutnik Planum. Ce lac n’est pas très grand, il mesure qu’environ 430 pieds (130 mètres) de large pour environ 20 milles (30 kilomètres) de long.
Les scientifiques émettent aussi l’hypothèse que son azote ait été liquide à une certaine période en raison d’une pression atmosphérique plus élevée et des conditions thermiques plus chaudes à la surface de la planète naine. Ils vont même plus loin en affirmant que « en plus de cet ancien lac, nous voyons aussi la preuve de canaux qui auraient également pu transporter des liquides dans le passé ». En clair, en plus d’un lac, ils évoquent la présence de rivières.
L’existence d’un océan à l’état liquide dans le sous-sol de Pluton
Cette découverte à la surface de Pluton relance la théorie de l’existence d’un océan à l’état liquide dans son sous-sol. L’idée avait été déjà émise l’année dernière. Il était estimé que « l’eau » de cet océan pourrait être composée d’eau mélangée à de l’ammoniaque et qu’il serait situé à des centaines de kilomètres sous la surface de la planète naine. Son état liquide serait maintenu par la chaleur interne du noyau. « Il semble très probable qu’il y a une couche importante d’eau liquide et d’autres substances sous cette surface glacée », a par exemple déclaré l’astrophysicien Rob Soria de l’ICRAR-Curtin University. « Il n’y a aucune information à ce stade sur la profondeur de l’eau liquide par rapport à la croûte de glace à la surface et son intérieur rocheux », a précisé le chercheur.
Le Dr Soria a aussi précisé que « la vie a une meilleure chance d’évoluer et de progresser rapidement dans un environnement avec de l’eau plus abondante et de la lumière comme source d’énergie ». « Si vous avez de l’eau et en plus des orifices de ventilation géothermiques ou de la chaleur de roches sous-jacentes, alors la vie pourrait évoluer, mais pas aussi rapidement. Elle ne pourrait peut-être jamais progresser au-delà du stade de bactéries », a-t-il précisé.
De la vie sur Pluton ? Et sur d’autres lunes ?
Une telle déclaration met en évidence la possibilité qu’il puisse exister de la vie sur Pluton. Cette hypothèse n’a rien de farfelu. Il existe aussi sur Terre des « extrêmophiles », des organismes excentriques capables de tolérer le froid et la chaleur extrême, mais aussi l’acidité, l’alcalinité, la radioactivité, la salinité élevée. Alors, pourquoi pas sur Pluton ?
« Sur Terre, nous avons des exemples de la vie souterraine jamais exposée aux rayons du soleil. Ils se serrent autour des points hydrothermaux pour stocker énergie et nutriments », explique Alan Duffy, astrophysicien de l’Université Swinburne. « L’existence de ce genre de vie nous a surpris sur la Terre et indique que les océans sous la surface des planètes de notre système solaire peuvent être capables d’accueillir une forme de vie similaire ».
Selon Matthew Agnew, an autre astrophysicien de Swinburne, les implications de cette découverte sont colossales. « Les implications sont stupéfiantes. Si la lointaine et congelée Pluton peut avoir de l’eau liquide, cela signifie que la vie peut exister à une distance beaucoup plus éloignée d’une étoile que ce que nous n’avons jamais cru possible ».
Plusieurs lunes glacées de notre système solaire, notamment Europa et Encelade autour de Jupiter et Titan autour de Saturne, pourraient posséder des océans liquides sous leur surface. Donc, potentiellement de la vie.
Pluton à nouveau une « vraie » planète ?
Une autre question qui se pose est de savoir si Pluton, déclassée de planète à planète naine en 2006, pourrait retrouver son statut initial de planète de notre système solaire. Alors que l’étiquette s’attache essentiellement à la taille, sa complexité géologique lui donne toutes les caractéristiques d’une véritable planète.
Ce n’est pas le point de vue de Rob Soria. Selon le chercheur, « il n’y a aucune chance d’un rétablissement au statut de planète, Pluton est trop petit ». Il considère que « l’Union astronomique internationale ne voudra pas changer son statut simplement sur la base de la présence de glace et d’eau alors que d’autres objets partagent les mêmes propriétés ». « Malheureusement, selon les définitions actuelles, Pluton reste une planète naine, même avec un océan sous la surface », approuve le Dr Duffy.