Un conseil qui peut vous paraître basique, mais qu’il sera nécessaire de vous remémorer lors d’une rencontre avec les singes de Floride : Ne les touchez pas ! Encore moins maintenant que les chercheurs de l’Université de Floride ont découvert que plus de 25% de ces envahisseurs abritent et transmettent une forme mortelle du virus de l’herpès : l’herpès B.
Les singes sauvages de Floride sont originaires d’Asie du Sud et d’Asie de l’Est et peuvent se montrer très efficaces lorsqu’il s’agit d’envahir un nouvel environnement, malgré leur aspect adorable. Ils sont arrivés à l’État de manière très habituelle — dans les bagages de voyageurs mal informés qui pensaient que ces petits animaux particulièrement mignons pouvaient charmer les touristes. Une douzaine de ces créatures a été introduite dans le parc de Silver Springs en Floride centrale entre 1930 et 1950, ils se sont rapidement multipliés, atteignant les 1000 individus en 2012 et nécessitant l’intervention du gouvernement pour les trapper et les sortir de la réserve. Une très forte mobilisation générale a arrêté la tentative de contrôle et le dernier recensement en date, effectuer en 215 a fait état de 175 macaques qui vivent encore dans le parc.
La biologiste de la faune sauvage à l’Université de Floride, Samantha Wisely explique que « Les journaux en font les titres, mais nous ignorons encore beaucoup de choses à propos de l’herpès B chez les macaques sauvages ». Elle assimile ce virus à la rage, leur propriété commune est qu’ils sont tous deux à faible risque, mais à forte incidence, dit-elle. « Le risque de contracter le virus est très faible, mais si ça vous arrive, les conséquences seront très importantes. »
Les scientifiques écrivent dans un article paru dans la revue scientifique « Emerging Infectious Diseases » et estiment que bien que moins d’un quart de la population simienne est porteuse du virus, généralement bénin chez les singes, mais dangereusement mortel chez les humains, beaucoup moins seraient réellement infectieux. Le virus est en incubation dans les nerfs des animaux atteints entre les poussées, tout comme les boutons de fièvre qui apparaissent par poussée chez les humains. Entre 4% et 14% des macaques libèrent le virus dans leur salive durant la période de reproduction qui a lieu en automne. Les excréments des singes sauvages ne seraient pas concernés, du moins pas par l’herpès B.
Le plus insolite dans l’histoire est que la plus forte incidence de cas avérés d’herpès B est principalement trouvée chez les laborantins ou chez les vétérinaires qui attrapent le virus après une morsure ou une exposition aux fluides corporels d’animaux infectés lors de leur travail à leur contact. Aucun cas n’a été répertorié chez des personnes mordues par un macaque sauvage, selon Wisely. (des incidents de ce genre se sont produits au moins 23 fois près du parc de Silver Springs entre 1977 et 1984.) Les créatures laissent leurs excréments partout, continue Wisely, augmenter les chances d’être atteints du virus de cette manière. « Pour être honnête avec vous, nous avons trouvé des excréments sur les toboggans et dans la cour de récréation », dit-elle.
L’équipe de chercheurs de Wisely a analysé les tests sanguins recueillis par les chasseurs affectés au contrôle de la population de singes, dans le but d’étudier le degré de propagation du virus de l’herpès B chez les macaques. Les résultats qui ressortent de l’analyse montrent que 25% des tests contenaient des anticorps du virus, des chiffres très probablement inférieurs à la réalité, déclare Wisely. Les trappeurs avaient en effet tendance à recueillir les échantillons auprès des singes les plus jeunes, n’ayant probablement pas encore été exposés au virus. Lorsque les chercheurs ont tenté de corriger ce biais en analysant la population adulte, les infections sont apparues dans les tests beaucoup plus fréquemment : 75% des singes âgés testés étaient porteurs de l’herpès B.
Un singe n’est pas nécessairement contagieux même s’il est porteur du virus, l’équipe a donc fait des tests sur la salive des singes plusieurs fois dans l’année en 2015. Pour obtenir la matière, ils ont imbibé des cotons-tiges d’eau sucrée et les ont lancés aux singes. « C’était une sorte de lancer vers des individus ciblés », a commenté Wisely. « Ils le mâchent pendant un moment puis lorsqu’ils comprennent que ce n’est pas de la nourriture, ils le recrachent. » Puisque les chercheurs ne pouvaient pas toujours tracer la provenance d’un extrait salivaire et identifier le singe à qui il appartient, les chiffres ne sont pas très exacts. Ils estiment cependant qu’entre 4% et 14% des singes secrètent le virus durant la période de reproduction, qui peut s’avérer stressantes pour les mâles et les femelles. Le virus n’a cependant pas été détecté dans les analyses de salives à d’autres périodes de l’année, ou dans les excréments récents qui ont été prélevés.
Est-ce que les gens devraient s’inquiéter de la présence de l’herpès B chez ces singes en Floride ? Ils ne devraient pas être complètement terrifiés, mais prudents quand même, dit Wisely. La Fish and Wildlife Commission de la Floride a déclaré dans un communiqué qu’elle prépare des solutions de « gestion active pour éliminer ces menaces ». En attendant, dit Wisely : « si vous avez envie de nourrir, de faire un câlin, ou de prendre un selfie avec la faune sauvage, retenez-vous. Ça ne fait de bien ni à elle ni à vous ».