Comment IPv6 jette les bases d’un Internet plus intelligent

Hicham EL ALAOUI
Rédigé par Hicham EL ALAOUI

IPv6 va permettre à Internet de grandir. Mieux que cela, ce protocole moderne devrait permettre à Internet de devenir potentiellement plus intelligent.

En raison du manque de place libre dans le système d’adressage IPv4, Internet est pratiquement à bout de souffle et ne peut plus grandir. La solution à ce problème urgent passe par l’adoption du protocole IPv6. En tant que protocole moderne, IPv6 ne va pas seulement permettre à Internet de continuer à grandir, il va aussi permettre de le rendre plus intelligent.

Pendant de nombreuses années, personne n’a véritablement vu l’utilité de passer à IPv6 alors qu’IPv4 satisfaisait tous les besoins. Aujourd’hui que le pool d’adresses est pratiquement vide, les transitions vers le nouveau protocole sont en train de considérablement augmenter. Dans les jours, semaines, mois, années à venir, cette migration va d’ailleurs encore s’accélérer.

En tant qu’un des principaux utilisateurs d’adresses IP, Comcast est un précurseur au niveau d’IPv6. Cela fait près de dix ans que le premier câblo-opérateur américain déploie le nouveau protocole. L’entreprise est ainsi devenue le premier FAI américain majeur à déployer parallèlement la pile IPv4 et la pile IPv6. À l’heure actuelle, plus de 80 % de ses clients prennent en charge IPv6. Le FAI s’attend à ce que près de 50 % de son trafic soit sur IPv6 avant la fin 2016. D’ici 2020, il prévoit même d’arrêter de prendre en charge IPv4.

La problématique des objets connectés

Que cela soient les fabricants, les investisseurs, les analystes, les politiques, tout le monde parle des objets connectés, un marché qui devrait représenter quelque 6,4 milliards de « choses » déjà connectées cette année selon Gartner Research. Ce chiffre reflète à lui tout seul la forte croissance attendue de ce marché en devenir. Le hic, c’est l’adressage de ces objets.

En effet, comment connecter 6,4 milliards d’objets à Internet, sans parler des dizaines de milliards d’objets qui seront connectés dans les années à venir alors qu’IPv4 ne totalise que 4,3 milliards d’adresses et que la quasi-totalité d’entre elles est d’ores et déjà utilisée ? La technologie NAT est utilisée pour contourner cette limitation, avec comme revers de la médaille l’introduction d’un coût et d’une complexité supplémentaires. Cette solution pénalise également les performances et la flexibilité du réseau, sans parler de certaines applications qui sont bloquées. Le coût de cette complexité, cependant, se fait sentir dans la performance et la flexibilité du réseau, et il empêche certaines applications Internet.

Comparativement, 340 milliards de milliards de milliards de milliards d’adresses sont disponibles avec IPv6, ce qui laisse de la place pour connecter de très nombreux objets. Plus intéressant encore, toutes ces adresses sont directement utilisables, sans NAT.

De la grandeur tout en étant plus simple et plus performant

Le fait qu’IPv6 puisse adresser 340 milliards de milliards de milliards de milliards d’adresses pourrait faire craindre une complexification du réseau. C’est en fait tout le contraire qui se produit avec une augmentation des performances par la suppression de la nécessité d’utiliser du NAT. De fait, au lieu d’être plus complexe, l’infrastructure réseau se simplifie en passant au nouveau protocole.

Depuis le début d’IPv6, les ingénieurs se sont rapidement rendu compte que les adresses 128 bits du protocole permettent de faire des choses qu’il est impossible de faire avec IPv4. En fait, chaque adresse est plus « intelligente » en jouant un rôle plus actif dans la détermination du chemin des paquets à travers le réseau. Au lieu que cela soit aux machines de prendre toutes les décisions en matière de routage, les applications elles-mêmes peuvent choisir des chemins d’accès aux services sur le réseau. Ce concept, appelé routage de segment d’IPv6 (IPv6 SR), est la prochaine étape majeure au niveau de l’architecture de réseau. C’est certainement la clé pour continuer à augmenter les flux sur des réseaux de plus en plus grands et complexes.

La virtualisation logicielle des réseaux (software-defined networking ou SDN) est un autre concept dont on parle de plus en plus. Cette technologie a aussi le potentiel de transformer les réseaux. Mais une telle révolution ne pourra s’appuyer que sur un protocole tel qu’IPv6. Même si le SDN fonctionne aussi avec IPv4, son plein potentiel ne peut être obtenu qu’avec la flexibilité d’IPv6.

Aujourd’hui, le passage à IPv6 n’est plus facultatif, mais obligatoire pour pouvoir continuer à croitre. Cela ne signifie pas pour autant qu’IPv4 va disparaitre, en tout cas pas tout de suite.

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