Les ambitions de la Chine en matière de cryptage sont énormes. Le lancement d’un satellite quantique pour le cryptage des communications en est la preuve.
Briser les limites des ordinateurs classiques actuels, c’est la promesse faite par les ordinateurs quantiques depuis de nombreuses années. Malgré le fait que Google se soit équipé d’un tel ordinateur, il n’en demeure pas moins que les progrès sont lents dans ce domaine. Dans ce sens, le satellite que vient de lancer la Chine va certainement donner un grand coup de pied dans la fourmilière.
C’est de la base de Jiuquan, dans le désert de Gobi, qu’une fusée Longue Marche 2-D a décollé à 1 h 40 pour placer en orbite le satellite d’expérimentation quantique à échelle spatiale (QUESS), également surnommé Mozi en hommage à un philosophe et scientifique chinois qui a vécu au Ve siècle av. J.-C. Sa mission de deux ans va être d’utiliser la technologie quantique dans le but de sécuriser les communications.
Pour communiquer d’une manière sécurisée, le satellite utilise des propriétés de corrélation quantiques des photons qui font que modifier l’un modifie immédiatement son jumeau, une propriété qui trahit immédiatement une intervention non désirée. De fait, si les signaux sont interceptés par un espion, l’intrusion sera immédiatement repérée et les informations envoyées ne seront pas utilisées, ce qui va permettre de transmettre des clés de chiffrement sans risque.
La Chine fait un pied de nez à l’Europe et aux États-Unis
Alors que l’informatique quantique semblait être l’apanage des États-Unis, la Chine vient de leur faire un sacré pied de nez en lançant ce satellite. Pékin fait d’ailleurs coup double en faisant également un pied de nez à l’Europe.
L’homme derrière ce projet est Pan Jianwei, un scientifique chinois qui a effectué sa thèse à l’université de Vienne, sous la direction d’un chercheur en physique quantique, Anton Zeilinger. Ce dernier raconte avoir demandé à l’Union européenne (UE) d’appuyer un programme de développement d’un satellite quantique sans jamais avoir obtenu les financements. De son côté, le Conseil national américain des sciences et technologies indique que les États-Unis dépensent actuellement 200 millions de dollars par an dans ce domaine de recherche tout en relevant que l’avancement dans ce domaine « a souffert de l’instabilité des financements ».
Clairement, la Chine s’est donné les moyens de maitriser les technologies quantiques. « De tels moyens en disent long sur les ambitions de la Chine. Elle n’hésite pas à investir des sommes colossales dans ces recherches », commente d’ailleurs Hoi Kwong Lo, chercheur en cryptographie quantique à l’université de Toronto (Canada).
« On sait depuis plusieurs années faire du cryptage quantique dans une même ville, mais pas entre des régions éloignées. L’emploi du satellite permet d’envisager un usage à l’échelle planétaire », résume Alexander Ling, professeur au Centre de technologies quantiques de l’université de Singapour. Cela met en évidence l’avantage pris par la Chine dans cette technologie.