Peu de monde connait le nom d’Alexandre Grothendieck. Cet homme, qui vient de décéder à l’âge de 86 ans, a pourtant été génie des mathématiques, notamment en révolutionnant la géométrie algébrique.
C’est ce jeudi 13 novembre 2014, à Saint-Girons dans l’Ariège, qu’Alexandre Grothendieck est décédé. Alors qu’il a cherché à éviter d’être sous les projecteurs toute sa vie, sa mort a failli passer inaperçue. D’ailleurs, qui connait Alexandre Grothendieck ?
Né à Berlin en 1928, le petit Sacha est le fils d’une mère divorcée d’origine protestante et bourgeoise et d’un père juif anarchiste qui le reconnaît, mais n’épouse pas sa mère. Face à la montée du nazisme, la famille est obligée de quitter l’Allemagne. Réfugiés en Espagne, ils participent à la guerre civile au côté du Front populaire alors que Sacha est envoyé à Hambourg, dans la famille d’un pasteur protestant.
Brièvement réunie, la famille éclatera au début de la guerre lorsque le père sera interné dans un camp de l’Ariège, puis à Auschwitz où il meurt en 1942. Emmenés dans un camp, à Rieucros en Lozère, Sacha et sa mère réussissent à en réchapper.
Scolarisé, Sacha francise son nom en Alexandre. Il finit ses études secondaires à Mende, sans éclat particulier. Une fois installé près de Montpellier, Alexandre entame une licence de mathématiques pour laquelle il ne brille pas non plus. Alors que le jeune homme affirme avoir mis au point une méthode pour calculer des volumes complexes, il intrigue son professeur.
Muni d’une lettre de recommandation, il prépare une thèse sous la férule de Laurent Schwartz et Jean Dieudonné. En à peine quelques mois, il apporte 14 réponses aux 14 énigmes sur lesquelles les deux grands mathématiciens butaient.
En l’espace de quelques mois, alors qu’il n’est âgé que de 20 ans, Alexandre Grothendieck rédige l’équivalent de six thèses de doctorat. Une brillante carrière universitaire s’ensuit au CNRS, en France puis au Brésil.
En raison de son statut d’apatride, qu’il ne veut pas abandonner, il ne peut rejoindre la fonction publique. C’est alors qu’il se décide de se réorienter vers la géométrie algébrique, domaine qu’il va complètement révolutionner.
Par sa capacité hors du commun à généraliser, à dépasser le cas particulier pour tracer des pistes de recherches, Alexandre Grothendieck devient une légende. Des centaines de mathématiciens travaillent encore aujourd’hui sur ses idées !
Grâce à Léon Motchane, un industriel suisse qui lui finance l’Institut des hautes études scientifiques de Bures sur Yvette, Alexandre Grothendieck rédige, entre 1960 et 1967, les quatre premiers chapitres des « Éléments de géométrie algébrique », en collaboration avec Jean Dieudonné.
Récompensé en 1966 de la médaille Fields, la plus haute récompense en mathématiques, Alexandre Grothendieck refuse de se rendre en URSS pour la recevoir.
Anarchiste dans l’âme, la vie d’Alexandre Grothendieck prend une autre direction à la fin des années 60. Délaissant la carrière universitaire, il embrasse la cause écologiste en fondant le groupe « Survivre et vivre », puis en fondant une communauté près de Paris, avec Justine Bumby. Il retourne finalement à Montpellier, où il enseigne à l’université jusqu’à sa retraite en 1988.
Après sa retraite, il s’est installé dans l’Hérault, en France. Alexandre Grothendieck a écrit quatre autres livres, dont le plus célèbre est « Récoltes et semailles », une autobiographie qui n’a pas trouvé d’éditeur.
Début 2010, il a écrit une note demandant que son œuvre disparaisse des bibliothèques et que toute réédition soit interdite : de son vivant, il a tenté d’organiser sa disparition, refusant même de révéler le nom du village des Pyrénées où il a mené une vie d’ermite jusqu’à sa mort. [VIDÉO]
Un personnage véritablement extraordinaire. J’ai le souvenir d’articles antérieurs à son sujet qui m’avaient fortement intrigué. À une époque si bassement matérialiste dominée par l’exhibitionnisme médiatique, Grothendieck passait pour le mouton noir de génie, mais forcément méconnu hors du cercle de ses pairs.
La question que je suis posée tout à l’heure après lecture, c’est pourquoi n’a-t-il pas brûlé ce qu’il possédait avant de partir ! mais visiblement si, il a bien brulé le reste de tous ses documents avant de partir ; et j’ai eu d’un coup l’intuition d’avoir compris pourquoi il est parti en brulant tout derrière lui ! tout le monde attend des scientifiques ou des matheux et autres, la vérité, une vérité ? Or, personne ne détient la vérité, et encore moins la science ! il s’en est rendu compte ! c’est pourquoi son cours a été « faut-il continuer la recherche scientifique ?». Personne ne détient la vérité ni dans les sciences ni dans la philosophie ! comme l’a dit Krishnamurti, je cite : « la vérité est un pays sans chemin ! voilà mes chéris.
Ce sont toujours les meilleurs qui partent les premiers, il était dans la fleur de l’âge paix à son âme signé un profane parmi les profanes des sciences mathématiques, pour atteindre son niveau, il fallait avoir une compétence d’abstraction et de conceptualisation élevée, peu perméable et intelligible à la cognition du commun des mortels que nous somme.
Et pendant quelques années, il a donné un séminaire d’initiation à la recherche en mathématiques aux étudiants en première année de mathématiques à l’Université des Sciences de Montpellier.
Un cours inoubliable et visionnaire : il essayait de nous apprendre à trouver, et surtout à bien poser les problèmes. Un cours digne du MIT ou de Princeton. C’est comme si Enstein s’occupait des travaux pratiques de physique au lycée Clémenceau de Montpellier.
Je me rappelle que nous avions eu aussi quelques cours sous les arbres du campus de l’Université.
À l’époque, je pensais à une carrière d’enseignant en mathématiques, ou à une carrière dans la recherche (mathématiques, physiques ou informatique), et je lui avais demandé son avis. Il m’avait alors décrit les travers du milieu académique ; compte tenu de mon caractère (rebelle !), il m’avait alors conseillé une carrière vers l’ingénierie et l’informatique. Et j’ai suivi ses conseils.
Je suis très ému par sa disparition.
Il a été mon prof. J’aurais bien aimé qu’il me transmette un millième de son génie…