La Norvège s’indigne de la censure faite par Facebook alors que le réseau social a supprimé un post publié par la Première ministre norvégienne.
Tout le monde connait la « fillette au napalm », cette célèbre photographie prise lors de la guerre du Vietnam qui montre un groupe d’enfants courant sur une route pour fuir un bombardement au napalm avec, au centre, une fillette nue gravement brûlée avec le visage tordu par la douleur. Ce cliché qui a fait le tour du monde a valu un prix Pulitzer à son auteur, la récompense la plus prestigieuse du journalisme américain. Certains historiens vont même jusqu’à affirmer que cette image a contribué à accélérer la fin de la guerre…
Alors que cette image fait pratiquement partie de l’histoire, Facebook l’a censurée il y a quelques semaines lorsqu’elle a été partagée par un écrivain norvégien sur le réseau social. Pour avoir osé protester contre cette censure, cet écrivain a même été temporairement banni.
C’est pour protester contre cette censure que l’Aftenposten a posté cette image. C’est ainsi que Facebook lui a fait savoir que le réseau social a « mis en place des limites sur la nudité, afin de limiter l’exposition des différentes personnes utilisant Facebook à du contenu sensible » et demandant au journal de retirer la photo ou de pixeliser la fillette. Moins de 24 heures plus tard, le réseau social a purement et simplement censuré l’image du compte du journal.
C’est pour cette raison que le journal a adressé une lettre ouverte à Mark Zuckerberg pour dénoncer cette censure. « Je vous écris cette lettre pour vous avertir que je n’obéirai pas à votre demande de retrait. Pas aujourd’hui ni dans le futur. Je pense que vous abusez de votre pouvoir et j’ai du mal à croire que vous y avez vraiment réfléchi », a écrit Espen Egil Hansen, son rédacteur en chef. « Je suis fâché, déçu, et même effrayé, de ce que vous êtes sur le point de faire subir à un pilier de notre société démocratique […] Les médias libres et indépendants ont un rôle important dans la publication d’informations, y compris des images qui peuvent parfois être dérangeantes, et que l’élite dominante et parfois même les simples citoyens ne peuvent supporter. C’est peut-être justement pour cette raison que leur rôle est important. […] Les médias ont la responsabilité de réfléchir à ce qu’ils publient, au cas par cas. Cela peut être une lourde responsabilité. […] Ce droit et ce devoir, que tous les journalistes du monde doivent exercer, ne devraient pas être sapés par un algorithme codé dans votre bureau californien. »
La solidarité de la Première ministre norvégienne aussi censurée
Suite à la publication de l’Aftenposten, la Première ministre norvégienne, Erna Solberg, a soutenu la démarche du quotidien en décidant de défier à son tour Facebook en publiant elle aussi la fameuse photo. « Pendant que j’étais dans l’avion entre Oslo et Trondheim, Facebook a supprimé un post de ma page Facebook », raconte la Première ministre.
« Ce que Facebook fait en supprimant des photos de ce type, aussi bonnes soient leurs intentions, c’est d’éditer notre histoire commune », s’insurge-t-elle après que son billet ait été supprimé. « J’espère que Facebook saisira cette occasion pour examiner sa politique rédactionnelle. »
Alors que l’incohérence de Facebook est régulièrement pointée du doigt, cette affaire n’arrive pas au bon moment. C’est ainsi que le réseau social se défend en déclarant : « Si nous reconnaissons que cette photo est iconique, il est difficile de faire une distinction et d’autoriser la photo d’un enfant nu dans un cas et pas dans d’autres ». C’est le rôle central que joue de plus en plus Facebook dans l’accès à l’information qui inquiète tout le monde, le fait que ses utilisateurs soient enfermés dans une bulle où ils ne sont exposés qu’aux idées et informations filtrées par le réseau social.
ça finira quand, cette pudibonderie, cette « morale » de détraqués sexuels?